Instruments de musique japonaise


Le koto

D’origine chinoise, le koto est une cithare sur table, d’environ 2 mètres de long. Il est apparu au Japon durant l'époque de Nara (553-794). C’est un des rares instruments d’origine typiquement chinoise. En Chine, nous retrouvons 2 types principaux de cithare sur table : un premier sans chevalets et un deuxième avec chevalets. Le koto provient du deuxième instrument. À l’origine, le mot koto faisait référence à tout instrument à cordes pincées. Plus tard, le nom en vint à désigner uniquement la cithare sur table. Durant la période de Nara, on retrouvait deux instruments de cette famille : le gaku-so, avec 12 ou 13 cordes, et le wagon avec 6 cordes. Le gaku-so était utilisé dans l’ensemble de Gagaku, la célèbre musique de cour japonaise. L’instrument est joué avec des plectres, appelés tsume, placés au pouce, au majeur et à l’index. Une version à 2 cordes, le nigenkin, existe ainsi qu’une autre version à une corde unique, le ichigenkin. Il existe un koto basse à 17 cordes qui a été créé au début du 20e siècle par le compositeur et interprète du koto Michio Miyagi, ainsi que des versions à 20, 25 et même 30 cordes.

Au XVIIe siècle, on commença à utiliser le koto pour accompagner des danses et à faire partie de petits ensembles. Précédemment, il servait uniquement à accompagner les chanteurs. Un nouveau répertoire a alors été créé et ce, à partir du répertoire de shamisen (un luth à trois cordes recouvert de peaux de serpent, de chat ou de chien). En fait, ce nouveau répertoire est à la source du répertoire de musique de chambre japonaise qu’on connaît aujourd’hui. Jusqu’à cette époque, le koto servait principalement à accompagner les chanteurs, sans toutefois avoir la popularité du shamisen. Faisant suite à ces changements, la popularité du koto augmenta considérablement.

Au XXe siècle, des musiciens ont tenté de moderniser le jeu du koto à partir de principes musicaux occidentaux. Ces développements ont porté fruit. Le premier instigateur de ces développements est l’interprète du koto et compositeur Michio Miyagi, un musicien qui devint aveugle à l’âge de 6 ans. Il est décédé en 1957. Un autre musicien qui poussa encore plus la modernisation du jeu du koto est Tadao Sawai; interprète du koto et compositeur de très grand talent, il est décédé en 1998. Il modifia presque complètement le jeu du koto en le rendant beaucoup plus rythmique et virtuose.

 

Le shakuhachi

Le shakuhachi est arrivé de Chine avec l’ensemble de Gagaku à l’époque de la dynastie des Tang (618-907). À cette époque, l’instrument avait 6 trous, comme l’instrument chinois d'aujourd’hui, le xiao. Vers le IXe siècle, on le retira de l’ensemble de Gagaku. Au Xe siècle, quatre moines chinois seront invités à enseigner le xiao à des moines japonais. L’instrument les captivera graduellement. Une version à 5 trous sera créée et utilisée à l'époque. Mais ce ne sera pas avant le XIIIe siècle que les moines de la secte buddhiste Fuke commenceront à l’utiliser en remplacement de la récitation chantée des sutras bouddhistes.

À l’ère d’Edo (1615-1868), le shakuhachi sera totalement transformé. Jusqu’à cette époque, similaire au xiao chinois, il était mince et allongé. Les fabriquants utilisèrent un bambou plus épais. À l’ère d’Edo, le nouveau shogun réussit à unifier le pays et à y instaurer la paix. Les samouraï n’avaient plus rien à faire du fait qu’ils ne pouvaient plus se battre. Plusieurs sont devenus des ronin, c’est-à-dire des samouraïs sans maître, et ont joints les rangs de moines itinérants de la secte Fuke, appelé komuso ou moine du vide. Ceux-ci quêtaient en jouant du shakuhachi sur la rue, portant un chapeau de paille. Déguisés en moines, ces ronin devinrent des espions pour le shogun, utilisant parfois leur shakuhachi pour se battre.

Au XXe siècle, le shakuhachi a subit d’autres changements. Au début du XXe siècle, un nouveau style a été créé, un style largement influencé par les principes de la musique occidentale, incluant développer une nouvelle notation. À la fin des années 1950, un shakuhachi a sept trous a été créé dans l’espoir de pouvoir interpréter des pièces occidentales. Il n’attira pas l’intérêt des musiciens plus traditionalistes et même les occidentaux qui, tous, préfèrent la version originale à cinq trous. Toutefois, il s’avéra être un bon instrument pour interpréter des chants folkloriques. Un autre développement d’importance est le fait qu’un grand nombre d’occidents s’intéressent suffisamment au shakuhachi, au point d’obtenir leurs titres de shi-han.

Vous trouverez une présentation plus détaillée de ces 2 instruments et de l'histoire de la musique japonaise dans l'article suivant : Une courte histoire de la musique japonaise, sur ce site.

La notation du koto et du shakuhachi

La notation musicale en musique japonaise traditionnelle est différente de la notation occidentale, bien qu'elle en a été influencée depuis les débuts du XXe siècle. Elle est encore utilisée. Toutefois, on retrouve à l'occasion des partitions écrites en notation occidentale.

Une des principales particularités de la notation japonaise est que chaque instrument a sa propre notation, que ce soit pour le koto, le shakuhachi, ou tout autre instrument. Les notes d'une partition de koto sont représentées par les chiffres des cordes. Le koto ayant 13 cordes, les chiffres de 1 à 10 sont utilisées pour les 10 premières cordes (à partir de la plus basse) et 3 caractères particuliers pour les 3 dernières cordes. Par contre, les notes d'une partition de shakuhachi sont représentées par des caractères qui représentent les doigtés de l'instrument. Quelques notes peuvent être produites par des doigtés différents, créant ainsi des changement de timbre. Un caractère spécifique a été créé pour chacun de ces doigtés. Par ailleurs, les partitions pour tous les instruments se lisent de haut en bas et de droite à gauche, comme l'écriture traditionnelle japonaise.

Voici quelques exemples de notation japonaise et une note explicative pour chaque partition. Pour voir ces partitions en format plus large, cliquez sur chacune d'elles.

 

 

 

Extrait de la partition de KOTO de la célèbre pièce « Rokudan No Shirabe » (vers 1750) attribué à Y. Kengyo. Les boîtes représentent des mesures à 4 temps, une idée calquée sur la notation occidentale. Ce type de notation est utilisée dans l'ensemble des répertoires du koto.

 

 

 

 

Extrait de la partition de SHAKUHACHI de la pièce « Rokudan No Shirabe » qui accompagne le koto. Dans le cas des partitions de ce répertoire de shakuhachi, on n'utilise pas les boîtes représentant des mesures, bien que les 2 instruments jouent ensemble. Ce type de notation est appelé « kinko ».

 

 



 

 

Extrait de la partition de SHAKUHACHI de la pièce « Haru No Umi » du compositeur et interprète du koto Michio Miyagi (écrite en 1929). Ce type de notation, similaire à celle du koto, est appelée « tozan » et a été créé à la fin du 19e siècle par le musicien Nakao Tozan. La majorité des pièces nouvelles depuis le début du XXe siècle sont publiées utilisant cette notation.

 


 
Extrait de la partition de SHAKUHACHI de la pièce pour duo de shakuhachi « Shika no Tône ». Ce type de notation est utilisée pour les pièces du répertoire solo du shakuhachi. Il peut même y avoir des variations entre les scripteurs. Cet exemple a été écrit par monsieur Yoshio Kurahashi, grand maître du shakuhachi japonais.
   

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Gravures japonaises de Shizuko Matsunaga.
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